1) Procédure - Article 6 du protocole d’accord de bon voisinage - Non-respect du protocole d’accord - Irrecevabilité d’une action en justice (non) - Protocole non opposable au demandeur (oui) - Action régulièrement introduite (oui) - Recevabilité de la demande (oui).
2) Responsabilité civile - Article 1382 du code civil - Absence de faute - Responsabilité de la défenderesse non retenue - Condamnation aux dommages - intérêts non justifiée - Demande mal fondée - Rejette la demande (oui).
RESUMÉ
Dès lors que l’article 6 du protocole d’accord de don voisinage, dont le non-respect allégué, serait cause d’irrecevabilité d’une action en justice, n’est pas opposable au demandeur, il y a lieu de déclarer recevable l’action régulièrement introduite suivant les conditions légales de forme et de délai.
En l’absence de faute, la responsabilité de la défenderesse ne saurait être retenue et justifier sa condamnation à des dommages intérêts en application de l’article 1382 du code civil. Il convient en conséquence de rejeter l’action du demandeur qui ne peut prospérer comme mal fondée.
Vu les pièces du dossier ;
Ouï les parties en leurs demandes, fins et conclusions ;
Vu les conclusions écrites du Ministère Public en date du 01/07/2020 ;
Ensemble l’exposé du litige ;
DE L’EXPOSE DU LITIGE ET MOYENS DES PARTIES
Suivant exploit de commissaire de justice en date du 18 février 2020, TAGNON Djiro Barthelemy a assigné par devant la juridiction de céans, la société IVOIRO-SUISSE ABIDJANAISE DE GRANIT dite SISAG, en responsabilité et en paiement de diverses sommes d’argent à titre de dommages-intérêts ;
Au soutien de son action, le demandeur expose qu’il est propriétaire d’une plantation d’hévéa d’une contenance de 4,9 hectares, sise à GABIADJI ;
Il indique qu’à proximité de sa plantation, la défenderesse exploite une carrière industrielle ;
Il explique que dans le cadre de ses activités, la SISAG s’adonne à des opérations d’explosion de granites à la dynamite ;
Lesquelles explosions ont pour impact, la destruction de ses plants d’hévéa ;
Il souligne qu’une expertise agricole réalisée à cet effet, a conclu à la responsabilité de la défenderesse quant à la destruction de ses plants et a évalué le préjudice matériel en résultant, à la somme de 25.978.150 francs, qui se chiffre à 649.453.750 francs, sur les 25 prochaines années ;
Le demandeur ajoute que sa plantation étant son unique source de revenus, sa perte lui occasionne aussi un préjudice moral, qu’il chiffre à 300.000.000 francs ;
Il sollicite donc la condamnation de la défenderesse au paiement des sus dites sommes d’argent, en réparation du préjudice, par lui, souffert ;
En réaction à cette action, la défenderesse soulève in limine litis, l’irrecevabilité de l’action du demandeur, pour défaut de saisine préalable de l’Autorité sous-préfectorale locale, en vue d’une issue négociée à leur différend, comme prévue par l’article 6 du protocole de bon voisinage conclu avec la famille TAGNON, dont le demandeur, le 20 juin 2008 ;
Elle soutient que cette action initiée avant l’arbitrage du Sous-Préfet de GABIADJI, encore saisi du différend, est prématurée et encourt l’irrecevabilité ;
Subsidiairement au fond, la société SISAG fait valoir qu’elle n’a commis aucune faute susceptible d’engager sa responsabilité délictuelle et par suite, justifier sa condamnation à des dommages-intérêts ;
Elle explique que son activité de production et commercialisation de granites, débutée depuis février 1999 est régulièrement menée, avec toutes les autorisations administratives requises ;
Elle souligne que ses activités générant des risques de voisinage, un protocole de bon voisinage a été conclu entre la famille TAGNON, propriétaire terrien, dont le demandeur, et elle, suivant lequel, elle lui verse annuellement la somme de 2.000.000 francs, comme indemnisation ;
Elle précise que son installation sur le site est antérieure à la création de la plantation en 2008, par le demandeur, qui n’ignorait pas les risques encourus ;
Pour la défenderesse, le demandeur qui en créant sa plantation à environ 250 mètres des tirs d’abattage de la roche de granite, donc à proximité de la carrière, s’est lui-même mis dans la situation de subir des troubles anormaux de voisinage, est mal venu à solliciter une réparation ;
Elle conclut donc au rejet de ses demandes, comme mal fondées ;
Répliquant, le demandeur fait valoir que le protocole de bon voisinage a été conclu entre la famille TAGNON et la SISAG et porte sur le site cédé à celle-ci, qui est un bien familial et ne concerne nullement sa personne et sa plantation, un bien propre, ici en cause ;
Pour lui, cette clause dont le non-respect allégué, serait cause d’irrecevabilité d’une action en justice, ne lui est donc pas opposable ;
Poursuivant sur le fond, le demandeur fait valoir que le caractère inhabituel des tirs à l’origine des dommages causés à sa plantation, ne pouvaient pas être connus de lui au moment de la création de sa plantation, et donc occulter la responsabilité de la défenderesse ;
Il estime que la théorie des troubles normaux de voisinage, n’a pas vocation à s’appliquer à l’espèce ;
Il ajoute qu’il n’a commis aucune faute, en faisant usage de son droit de propriété sur sa parcelle, à proximité de la carrière de la SISAG ;
Le Ministère Public en ses écritures du 01 juillet 2020, a conclu à la recevabilité de la présente action et au rejet des prétentions du demandeur, comme mal fondées ;
DES MOTIFS
Toutes les parties ayant conclu au dossier, il sera statué par décision contradictoire ;
Il résulte des productions au dossier, notamment du protocole d’accord de bon voisinage conclu entre la demanderesse et la famille du demandeur, le 20 juin 2008, que cet acte porte sur les litiges relatifs à la parcelle sur laquelle est située la carrière de GABIADJI, exploitée par la SISAG, qui est un bien des ayants droit de feu TAH TAGNON FELIX, et ne concerne pas le demandeur pris isolément, encore moins sa plantation ;
Dès lors, l’article 6 de cet acte, dont le non-respect allégué, serait cause d’irrecevabilité d’une action en justice, n’est donc pas opposable au demandeur ;
Partant, son action régulièrement introduite, suivant les conditions légales de forme et de délai, est recevable ;
Au fond
Au regard de l’article 1382 du code civil, la responsabilité délictuelle résulte d’une faute à l’origine d’un préjudice ;
En la cause, s’il est indéniable que le préjudice subi par le demandeur est patent, eu égard aux dommages causés à sa plantation d’hévéa, la faute de la défenderesse, est moins évidente ;
En effet, il n’est pas contesté que la SISAG exerce son activité d’exploitation d’une carrière granitique, suivant toutes les autorisations administratives ;
Il est aussi avéré que cette activité d’explosion de dynamite, est source de risques pour les parcelles avoisinantes et de troubles de voisinage pour les riverains ;
Cependant, il est constant que l’installation de la défenderesse sur le site depuis les années 1999–2000, est antérieure à la création de la plantation du demandeur, en 2008 ;
Dans ces conditions, sauf à démontrer que le préjudice subi par le demandeur résulte d’une activité inhabituelle de la SISAG, celui-ci est mal venu à invoquer une faute, au passif de celle-là ;
Ce faisant, en l’absence de faute, la responsabilité de la SISAG ne saurait être retenue et justifier sa condamnation à des dommages-intérêts ;
En conséquence, cette demande de TAGNON DJIRO BARTHELEMY, ne peut prospérer et doit être rejetée, comme mal fondée ;
Le demandeur qui succombe à la présente instance, doit en supporter les dépens.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en premier ressort ;
Déclare la TAGNON DJIRO BARTHELEMY, recevable en son action ;
Au fond, dit que la responsabilité de la société SISAG ne peut être retenue ;
Par suite, déboute le demandeur de toutes ses prétentions, comme mal fondées ;
Le condamne en outre, aux entiers dépens de l’instance ;
Ainsi fait et jugé les jour, mois et an susdits ;
Et ont signé le Président et le Greffier.
PRESIDENT : Mme NIAMIEN EUGENIE DOUKROU
Vu les pièces du dossier ;
Ouï les parties en leurs demandes, fins et conclusions ;
Vu les conclusions écrites du Ministère Public en date du 01/07/2020 ;
Ensemble l’exposé du litige ;
DE L’EXPOSE DU LITIGE ET MOYENS DES PARTIES
Suivant exploit de commissaire de justice en date du 18 février 2020, TAGNON Djiro Barthelemy a assigné par devant la juridiction de céans, la société IVOIRO-SUISSE ABIDJANAISE DE GRANIT dite SISAG, en responsabilité et en paiement de diverses sommes d’argent à titre de dommages-intérêts ;
Au soutien de son action, le demandeur expose qu’il est propriétaire d’une plantation d’hévéa d’une contenance de 4,9 hectares, sise à GABIADJI ;
Il indique qu’à proximité de sa plantation, la défenderesse exploite une carrière industrielle ;
Il explique que dans le cadre de ses activités, la SISAG s’adonne à des opérations d’explosion de granites à la dynamite ;
Lesquelles explosions ont pour impact, la destruction de ses plants d’hévéa ;
Il souligne qu’une expertise agricole réalisée à cet effet, a conclu à la responsabilité de la défenderesse quant à la destruction de ses plants et a évalué le préjudice matériel en résultant, à la somme de 25.978.150 francs, qui se chiffre à 649.453.750 francs, sur les 25 prochaines années ;
Le demandeur ajoute que sa plantation étant son unique source de revenus, sa perte lui occasionne aussi un préjudice moral, qu’il chiffre à 300.000.000 francs;
Il sollicite donc la condamnation de la défenderesse au paiement des sus dites sommes d’argent, en réparation du préjudice, par lui, souffert ;
En réaction à cette action, la défenderesse soulève in limine litis, l’irrecevabilité de l’action du demandeur, pour défaut de saisine préalable de l’Autorité sous-préfectorale locale, en vue d’une issue négociée à leur différend, comme prévue par l’article 6 du protocole de bon voisinage conclu avec la famille TAGNON, dont le demandeur, le 20 juin 2008;
Elle soutient que cette action initiée avant l’arbitrage du Sous-Préfet de GABIADJI, encore saisi du différend, est prématurée et encourt l’irrecevabilité ;
Subsidiairement au fond, la société SISAG fait valoir qu’elle n’a commis aucune faute susceptible d’engager sa responsabilité délictuelle et par suite, justifier sa condamnation à des dommages-intérêts ;
Elle explique que son activité de production et commercialisation de granites, débutée depuis février 1999 est régulièrement menée, avec toutes les autorisations administratives requises ;
Elle souligne que ses activités générant des risques de voisinage, un protocole de bon voisinage a été conclu entre la famille TAGNON, propriétaire terrien, dont le demandeur, et elle, suivant lequel, elle lui verse annuellement la somme de 2.000.000 francs, comme indemnisation;
Elle précise que son installation sur le site est antérieure à la création de la plantation en 2008, par le demandeur, qui n’ignorait pas les risques encourus ;
Pour la défenderesse, le demandeur qui , en créant sa plantation à environ 250 mètres des tirs d’abattage de la roche de granite, donc à proximité de la carrière, s’est lui-même mis dans la situation de subir des troubles anormaux de voisinage, est mal venu à solliciter une réparation ;
Elle conclut donc au rejet de ses demandes, comme mal fondées;
Répliquant, le demandeur fait valoir que le protocole de bon voisinage a été conclu entre la famille TAGNON et la SISAG et porte sur le site cédé à celle-ci, qui est un bien familial et ne concerne nullement sa personne et sa plantation, un bien propre, ici en cause ;
Pour lui, cette clause dont le non-respect allégué, serait cause d’irrecevabilité d’une action en justice, ne lui est donc pas opposable ;
Poursuivant sur le fond, le demandeur fait valoir que le caractère inhabituel des tirs à l’origine des dommages causés à sa plantation, ne pouvaient pas être connus de lui au moment de la création de sa plantation, et donc occulter la responsabilité de la défenderesse ;
Il estime que la théorie des troubles normaux de voisinage, n’a pas vocation à s’appliquer à l’espèce;
Il ajoute qu’il n’a commis aucune faute, en faisant usage de son droit de propriété sur sa parcelle, à proximité de la carrière de la SISAG ;
Le Ministère Public en ses écritures du 01 juillet 2020, a conclu à la recevabilité de la présente action et au rejet des prétentions du demandeur, comme mal fondées ;
DES MOTIFS
Toutes les parties ayant conclu au dossier, il sera statué par décision contradictoire ;
Il résulte des productions au dossier, notamment du protocole d’accord de bon voisinage conclu entre la demanderesse et la famille du demandeur, le 20 juin 2008, que cet acte porte sur les litiges relatifs à la parcelle sur laquelle est située la carrière de GABIADJI, exploitée par la SISAG, qui est un bien des ayants droit de feu TAH TAGNON FELIX, et ne concerne pas le demandeur pris isolément, encore moins sa plantation ;
Dès lors, l’article 6 de cet acte, dont le non-respect allégué, serait cause d’irrecevabilité d’une action en justice, n’est donc pas opposable au demandeur ;
Partant, son action régulièrement introduite, suivant les conditions légales de forme et de délai, est recevable ;
Au fond
Au regard de l’article 1382 du code civil, la responsabilité délictuelle résulte d’une faute à l’origine d’un préjudice ;
En la cause, s’il est indéniable que le préjudice subi par le demandeur est patent, eu égard aux dommages causés à sa plantation d’hévéa, la faute de la défenderesse, est moins évidente ;
En effet, il n’est pas contesté que la SISAG exerce son activité d’exploitation d’une carrière granitique, suivant toutes les autorisations administratives ;
Il est aussi avéré que cette activité d’explosion de dynamite, est source de risques pour les parcelles avoisinantes et de troubles de voisinage pour les riverains;
Cependant, il est constant que l’installation de la défenderesse sur le site depuis les années 1999–2000, est antérieure à la création de la plantation du demandeur, en 2008 ;
Dans ces conditions, sauf à démontrer que le préjudice subi par le demandeur résulte d’une activité inhabituelle de la SISAG, celui-ci est mal venu à invoquer une faute, au passif de celle-là ;
Ce faisant, en l’absence de faute, la responsabilité de la SISAG ne saurait être retenue et justifier sa condamnation à des dommages-intérêts ;
En conséquence, cette demande de TAGNON DJIRO BARTHELEMY, ne peut prospérer et doit être rejetée, comme mal fondée ;
Le demandeur qui succombe à la présente instance, doit en supporter les dépens.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en premier ressort;
Déclare la TAGNON DJIRO BARTHELEMY, recevable en son action;
Au fond, dit que la responsabilité de la société SISAG ne peut être retenue ;
Par suite, déboute le demandeur de toutes ses prétentions, comme mal fondées;
Le condamne en outre, aux entiers dépens de l’instance ;
Ainsi fait et jugé les jour, mois et an susdits ;
Et ont signé le Président et le Greffier.